Dossier

Migrantes : les stéréotypes ont la vie dure

Lorsqu’elle accouche en France, une femme immigrée a deux fois plus de risques de mourir en couches. Et si cette femme est née en Afrique subsaharienne, le risque est multiplié par cinq par rapport à une femme née en France ! D’où provient cette flagrante inégalité de santé ? Les causes de cette surmortalité sont-elles à chercher dans l’histoire de ces patientes, leur patrimoine génétique, leur parcours clinique, leur condition sociale ? Tous ces facteurs ont leur importance. Mais à eux seuls, ils ne paraissent pas suffire à expliquer d’aussi graves résultats. Encore rares en France, de récentes études tentent de comprendre le phénomène. Elles commencent à pointer du côté des professionnels de santé eux-mêmes et de l’organisation des soins. Sans même en avoir conscience, les soignants seraient-ils racistes ? UNE NAISSANCE SUR QUATRE En 2015, 22 % des enfants nés en France avaient une mère elle-même née à l’étranger, soit presque un quart des naissances au total. Parmi ces femmes, les plus nombreuses venaient d’Afrique du Nord. En 2015, elles comptaient pour 8 % des naissances, tandis que celles nées en Afrique subsaharienne avaient accouché de 6 % des bébés nés dans l’Hexagone. Depuis de nombreuses années, la population des femmes immigrées augmente progressivement. En 2010, elles comptaient pour 15 % des naissances en France. Dans notre pays, la mortalité maternelle est rare. Elle concerne 1 naissance sur 10 000 (voir Profession Sage-Femme n° 239). Avec 1 à 3 cas sur 100, selon les définitions retenues, la morbidité maternelle sévère est plus commune.

Dossier

ENP 2016 : dans le vif des pratiques

En mars 2016, durant une semaine, l’équipe Epopée de l’Inserm a mené l’enquête dans toutes les maternités de France, recueillant une multitude d’indicateurs à la fois auprès des établissements et auprès des femmes, lors d’entretiens menés par près de 1300 enquêteurs. L’analyse des données de 14 142 naissances et auprès de 13 894 femmes permet d’avoir une photo complète et représentative des femmes et de leurs bébés, des pratiques médicales et de l’organisation des soins (voir page 18). Plusieurs items de l’Enquête Nationale Périnatale (ENP) permettent de vérifier si les mesures de santé publique sont appliquées et si les recommandations médicales sont mises en oeuvre sur le terrain. Globalement, la prévention en prénatal laisse à désirer. À l’accouchement en revanche, les pratiques professionnelles ont connu des progrès notables. En postnatal, l’enquête ne permet pas d’évaluer si les soins sont optimaux. PRÉVENTION : PEUT MIEUX FAIRE Avant de concevoir un enfant, seuls 35,3 % des femmes se sont rendues à une consultation préconceptionnelle. Est-ce parce que les gynécologues, médecins généralistes ou sages-femmes ne la promeuvent pas suffisamment ? Ou est-ce que les femmes ne souhaitent pas « médicaliser » la période où elles tentent de concevoir un enfant ? L’ENP ne peut le dire. Autre constat récurrent d’une enquête périnatale à l’autre : la prise d’acide folique pour prévenir les anomalies de fermeture du tube neural reste faible. Elle ne concerne que 23 % des femmes. Le suivi de grossesse par les soignants est à parfaire. Une majorité semble ignorer la prévention du tabagisme en consultation. Bien que 80 % des femmes aient été interrogées sur leur consommation de tabac, plus de la moitié des fumeuses disent n’avoir reçu aucun conseil pour diminuer ou arrêter. Au total, 17 % des femmes ont fumé au moins une cigarette par jour au troisième […]

Dossier

Aborder la maternité des patientes obèses

En 2025, plus de 21 % des femmes du monde entier seront obèses, à en croire certaines projections. En 2011-2012, aux Etats-Unis, la pathologie concernait 31,8 % des femmes âgées de 20 à 39 ans. L’épidémie a gagné le pays rapidement puisque dans les années 1970, moins de 10 % des Américaines du même âge étaient concernées. La France, que l’on a longtemps crue protégée, n’est pas épargnée. En 2012, 15,7 % des femmes étaient obèses. La proportion a presque doublé en quinze ans. « C’est un problème majeur de santé publique, s’inquiète Philippe Deruelle, gynécologue-obstétricien au CHU de Lille. L’obésité maternelle concerne

Dossier

À la Maison des femmes de Saint-Denis

«Je n’arrive pas à oublier les souvenirs. Quand je dors, je vois. » Dans cette petite salle de consultation de la Maison des femmes, à Saint-Denis (93), Fatoumata* évoque ses flashbacks avec Mathilde Delespine. « C’est normal. Cela veut dire que vous êtes normale », veut rassurer la sage-femme, qui tient une consultation spécialisée sur les violences sexuelles. « Les situations vécues sont bien intégrées dans notre cerveau, dans la mémoire. Sauf les viols et les violences, qui restent piégés dans le cerveau », poursuit-elle. Arrivée en France voilà deux ans, Fatoumata est « venue par la mer ». Depuis, elle dort dans la rue ou dans un bus de nuit et cherche à obtenir un statut de réfugiée. Elle a subi viol et excision et craint beaucoup pour sa fille de 6 ans, confiée, le temps du grand voyage, à une amie restée au pays. « Mes parents ont dénoncé mon amie et repris ma fille il y a trois mois environ. Chez nous, l’excision a généralement lieu entre 6 et 8 ans. » Dans deux semaines, Fatoumata reviendra consulter une avocate, pour obtenir des conseils pour protéger son enfant. Quelques jours après, elle participera à un groupe de parole dédié aux violences sexuelles et rencontrera une psychologue. Ouverte depuis juillet 2016, la Maison des femmes est un lieu ressource pour les victimes de violences liées au genre. « En tout cas, vous êtes très jolie aujourd’hui », commente la sage-femme, qui connaît sa patiente depuis un petit mois. « C’est grâce à vous », répond, femme forte, Fatoumata.

Dossier

La démographie des sages-femmes en questions

Objectiver les besoins futurs en sages-femmes, notamment via des projections démographiques, telle est la mission de l’Observatoire national de la démographie des professions de santé (ONDPS). Le rapport, intitulé Les sages-femmes : une profession en mutation, part du constat de l’augmentation du nombre de sages-femmes ces dernières années. Progression qui, si le numérus clausus se maintient à son niveau actuel, va se poursuivre. Une question « brûlante » pour Isabelle Richard, nouvelle présidente de l’ONDPS (voir “Entretien” page 18). Y aura-t-il trop de sages-femmes et pas assez d’activité pour toutes ? Telle est l’enjeu central du rapport. La majorité des données publiées portent sur 2014. Déjà obsolètes, elles indiquent certaines tendances.

Dossier

Pleins feux sur l’endométriose

«Les règles, c’est naturel. Pas la douleur. » En 2016, ce slogan s’est répandu dans les rues et les magazines via de nombreuses affiches. Lancée par le Gouvernement, la campagne d’information sur l’endométriose a atteint son objectif. Les autorités sanitaires auraient-elles enfin pris en compte l’ampleur du désastre ? L’endométriose toucherait en effet une femme sur dix en âge de procréer. Un chiffre souvent répété, bien que l’épidémiologie de cette maladie inflammatoire chronique soit encore mal connue. Ces dernières années, les travaux de recherche se sont pourtant multipliés. Les conférences aussi. Le dernier congrès du Collège des gynécologues-obstétriciens français (CNGOF), qui s’est tenu en décembre 2016, en a fait un sujet phare. En collaboration avec la Haute Autorité de santé (HAS), il vient de commencer à travailler sur la rédaction de recommandations pour la pratique clinique (RPC), attendues